Les lève-tôt pourraient avoir hérité de l’horloge biologique plus rapide des Néandertaliens
Une récente étude suggère que les lève-tôt devraient remercier les hommes de Neandertal pour leurs habitudes matinales.
Une analyse a révélé que les gènes transmis par les Néandertaliens et les Dénisoviens, deux anciens cousins de l’humain moderne, pourraient contribuer à faire de certains d’entre nous des personnes matinales.
Selon Tony Capra, de l’université de Californie à San Francisco :
C’était vraiment passionnant pour nous, et nous ne nous y attendions pas. Les Néandertaliens et les Dénisoviens ont transmis de l’ADN qui augmente notre capacité à être matinal, et cet ADN a été conservé dans les populations humaines modernes.
Selon l’étude, il est possible que les Néandertaliens et les Dénisoviens aient développé ces mutations en vivant dans des environnements plus froids et plus sombres pendant plus longtemps que nos ancêtres directs.
Chaque être humain vivant aujourd’hui doit l’écrasante majorité de son ADN à l’Homo sapiens qui vivait en Afrique jusqu’à une époque relativement récente. En cours de route, des scientifiques pensent que certains de nos ancêtres ont récupéré du matériel génétique provenant de branches éteintes de l’humanité, notamment les Néandertaliens et les Dénisoviens.
La plupart de ces variations ont été éliminées au fil du temps. Mais les scientifiques pensent que les personnes d’origine européenne et asiatique doivent encore environ 2 % de leur génome aux Néandertaliens et que les habitants de Papouasie-Nouvelle-Guinée peuvent rattacher environ 5 % de leur ADN aux Dénisoviens. Ces derniers, avec les Néandertaliens se sont aventurés hors d’Afrique il y a des centaines de milliers d’années, bien avant nos ancêtres directs. Ils ont donc eu beaucoup plus de temps pour adapter leurs gènes aux environnements plus froids et plus sombres de l’Eurasie occidentale et septentrionale.
A partir de l’étude : (A) Les humains anatomiquement modernes et les hominines archaïques ont évolué séparément à des latitudes différentes pendant des centaines de milliers d’années. Les ancêtres des humains modernes d’Eurasie ont quitté l’Afrique vers 70 ka et se sont mélangés aux hominines archaïques, probablement dans le sud-ouest de l’Asie. La zone ombrée en Eurasie représente l’aire de répartition approximative des Néandertaliens. Le point en Asie représente l’emplacement de l’individu Dénisovien séquencé dans les montagnes de l’Altaï ; l’aire de répartition complète des Dénisoviens est actuellement inconnue. (B) Après la séparation entre les lignées humaines et archaïques, chaque groupe a accumulé des variations et évolué dans son environnement respectif pendant environ 700 ka. Les humains ont acquis des allèles introgressés des Néandertaliens et des Dénisoviens vers 60 et 45 ka, respectivement. Ces allèles ont subi de fortes pressions sélectives ; cependant, ∼40% du génome conserve des ancêtres archaïques dans certaines populations modernes. La deuxième question que nous explorons est de savoir si l’introgression a contribué à la biologie circadienne humaine. (K. Velazquez-Arcelay et col./ Genome Biology and Evolution)
Nos ancêtres n’ont commencé à être confrontés à ce type de climat qu’il y a environ 50 000 à 60 000 ans, c’est-à-dire au moment de la grande vague de migration vers l’Europe. Il serait donc logique que ces mutations génétiques des Néandertaliens et des Dénisoviens donnent à certains d’entre nous une longueur d’avance dans les mois froids de l’hiver eurasien.
Tony Capra, de l’université de Californie à San Francisco, et ses collègues ont cherché à savoir si certaines de ces variations d’ADN auraient pu faire de nous des lève-tôt, nous aidant ainsi à tirer profit des courtes journées de l’hiver eurasien. Afin d’évaluer sa théorie, les chercheurs ont comparé les génomes de trois Néandertaliens et d’un Dénisovien aux génomes de centaines de milliers d’humains modernes provenant d’une banque de données ou biobanque appelée l’UK Biobank.
Ils ont trouvé plus d’un millier de mutations partagées entre les humains d’aujourd’hui et les Néandertaliens ou les Dénisoviens, selon le New York Times. Plusieurs d’entre elles avaient déjà été identifiées comme jouant un rôle dans la régulation de l’horloge biologique humaine. En examinant les résultats des questionnaires remplis par les personnes figurant dans la biobanque, les scientifiques ont découvert que les porteurs de ces mutations étaient plus susceptibles de se décrire comme des lève-tôt, selon le Times.
Bien que l’étude soit prometteuse, elle doit être prise avec des pincettes, selon d’autres scientifiques. Les études basées sur des biobanques ne font que suggérer une association entre les gènes et les symptômes ou les comportements. Les scientifiques ont généralement besoin de davantage de travaux expérimentaux pour s’assurer qu’il existe un lien univoque entre les gènes et les caractéristiques.
Nous n’en sommes qu’au début des recherches sur la façon dont notre corps régule notre métabolisme. Il n’est donc pas certain, pour Capra et ses collègues dans l’étude, que le fait d’être porteur d’une mutation spécifique signifie que vous serez du matin, car de nombreux autres facteurs entrent généralement en jeu.
Selon Michael Dannemann, généticien évolutionniste à l’université de Tartu en Estonie, une façon d’étudier cette question pourrait être de fabriquer en laboratoire des cellules humaines avec les mutations de l’horloge biologique/ circadienne des Néandertaliens et des Dénisoviens pour voir comment cela affecte leur comportement. Selon lui, cette étude représente un « pas en avant » qui non seulement met en lumière l’ADN humain vivant, mais pourrait aussi nous aider à mieux comprendre la biologie des Néandertaliens.
L’étude publiée dans la revue Genome Biology and Evolution : Archaic Introgression Shaped Human Circadian Traits.