De l’ADN révèle des cas de trisomie 21 et 18 aux âges du bronze et du fer
Une analyse d’ADN a révélé un nombre plus élevé que prévu de cas de trisomie 21 (ou syndrome de Down) dans les sociétés humaines du passé, remontant jusqu’à 5 000 ans. Il s’agit également de ce qui pourrait être la première identification de trisomie 18 (ou syndrome d’Edwards) dans des vestiges préhistoriques.
Image d’entête : les restes de l’individu « CRU001 », dont les chercheurs ont découvert qu’il était atteint du syndrome de Down. Les restes ont été découverts sur un site espagnol datant de l’âge du fer. (Gobierno de Navarra/ J.L. Larrion)
Environ 10 000 échantillons ont été analysés dans le cadre de cette recherche publiée cette semaine (lien plus bas). Le syndrome de Down est une maladie génétique dans laquelle une copie supplémentaire du chromosome 21 est héritée en raison d’une division cellulaire anormale. C’est pourquoi il est également appelé trisomie 21. Aujourd’hui, le syndrome de Down est observé dans environ 1 naissance sur 1 000.
Selon le premier auteur de l’étude, le Dr Adam Rohrlach, statisticien à l’université d’Adélaïde (Australie) :
À l’aide d’un nouveau modèle statistique, nous avons analysé l’ADN extrait de restes humains datant du mésolithique, du néolithique, des âges du bronze et du fer jusqu’au milieu des années 1800. Nous avons identifié six cas de syndrome de Down. Nous nous attendions à ce que des personnes atteintes du syndrome de Down aient certainement existé dans le passé, mais c’est la première fois que nous sommes en mesure de détecter de manière fiable des cas dans des vestiges anciens, car ils ne peuvent pas être diagnostiqués avec certitude en examinant uniquement les vestiges squelettiques.
Selon la Dr Patxuka de Miguel Ibáñez de l’université d’Alicante en Espagne, coauteure de l’étude :
Le modèle statistique identifie le moment où un individu a environ 50 % de trop d’ADN provenant d’un chromosome spécifique.
Elle ajoute que cette recherche peut aider à identifier le syndrome de Down chez d’autres individus de l’antiquité :
Nous avons ensuite comparé les restes des personnes atteintes du syndrome de Down pour y déceler des anomalies squelettiques courantes telles qu’une croissance osseuse irrégulière ou la porosité des os du crâne, ce qui pourrait permettre d’identifier de futurs cas de syndrome de Down lorsque de l’ADN ancien ne peut pas être récupéré.
L’un des exemples trouvés dans le cimetière d’une église en Finlande date du 17e ou du 18e siècle. Mais les cinq autres cas avaient entre 2 500 et 5 000 ans. Ils ont été découverts sur des sites de l’âge du bronze en Grèce et en Bulgarie, et sur des sites de l’âge du fer en Espagne.
Vue aérienne de la colonie du début de l’âge du fer d’Alto de la Cruz, en Navarre, où les restes de l’individu « CRU001 » ont été découverts (image d’entête) lors de la campagne de fouilles de 1989. (Servicio Patrimonio Histórico Gobierno de Navarra)
Reconstruction du village de Las Eretas, Navarre, datant du début de l’âge du fer. (Iñaki Diéguez/Javier Armendáriz, Museo Las Eretas, Navarra)
Les personnes atteintes du syndrome de Down peuvent aujourd’hui mener une vie heureuse et longue, souvent avec l’aide de la médecine moderne. Mais cela ne fut pas toujours le cas par le passé. Les six personnes atteintes du syndrome de Down identifiées dans le cadre de l’étude sont toutes décédées à un très jeune âge. Un seul enfant a atteint l’âge d’un an environ. Les 5 sépultures préhistoriques étaient accompagnées d’objets particuliers tels que des colliers de perles colorées, des anneaux de bronze et des coquillages.
Selon Rohrlach :
Ces sépultures semblent nous montrer que ces personnes étaient soignées et appréciées dans leurs anciennes communautés.
Un autre individu présentait des signes d’un autre type de trisomie : la trisomie 18, ou syndrome d’Edwards. Comme par le passé, le syndrome d’Edwards est aujourd’hui moins fréquent que la trisomie 21, puisqu’il n’apparaît que dans 1 cas sur 3 000 naissances. Ce syndrome est également beaucoup plus grave. L’enfant découvert dans l’étude présentait de graves anomalies de croissance osseuse et il est mort environ 40 semaines après le début de la gestation. Ce dernier cas a également été découvert dans l’un des sites espagnols de l’âge de fer.
Selon le professeur Roberto Risch, archéologue à l’université autonome de Barcelone et coauteur de l’étude :
Pour l’instant, nous ne pouvons pas dire pourquoi nous trouvons autant de cas sur ces sites. Mais nous savons qu’ils appartenaient aux quelques enfants qui avaient le privilège d’être enterrés à l’intérieur des maisons après leur mort. C’est déjà un indice qu’ils étaient perçus comme des bébés spéciaux.
L’étude publiée dans Nature Communications : Cases of trisomy 21 and trisomy 18 among historic and prehistoric individuals discovered from ancient DNA et présentée sur le site de la Société Max Planck : Ancient genomes reveal Down Syndrome in past societies et sur le site de l’Université d’Adelaïde : Ancient DNA reveals Down syndrome in past human societies.