Sur les étranges mouvements des dunes martiennes qui ne se produisent pas sur Terre
Mars et la Terre ont peut-être beaucoup en commun, mais les processus qui sculptent leurs dunes de sable sont bien différents. On ne sait pas exactement comment le sable martien se déplace dans les crevasses et les cratères d’impact, mais des chercheurs en ont désormais une meilleure idée.
Image d’entête : vue du sommet d’une dune de sable martienne, depuis l’astromobile Curiosity, le 13 décembre 2015. (NASA)
Des scientifiques planétaires ont révélé en détail comment les vents violents, la minceur de l’atmosphère, la température et la topographie se conjuguent pour façonner ce paysage extraterrestre et comment il se distingue du mouvement du sable sur Terre. Ces recherches pourraient aider à planifier un voyage habité vers Mars.
Malgré les tempêtes de poussière occasionnelles à l’échelle de la planète (à l’origine de la panne définitive d’Opportunity), en général les vents martiens n’ont pas tendance à déplacer autant de sable qu’on pourrait le croire. C’est parce que l’atmosphère de la planète est mince et fragile. En fait, la pression atmosphérique moyenne de surface n’est que de 0,6 % de la pression atmosphérique au niveau de la mer de la Terre. En conséquence, les vents de la planète rouge sont plutôt faibles.
Selon Matthew Chojnacki, scientifique planétaire à l’université d’Arizona (Lunar and Planetary Lab) :
Sur Mars, il n’y a tout simplement pas assez d’énergie éolienne pour déplacer une quantité substantielle de matière en surface.
Il faudra peut-être deux ans sur Mars pour voir le même mouvement qu’en une saison sur Terre.
Les scientifiques planétaires ne savaient pas si les paysages de sable martiens étaient encore en mouvement. Ils ont choisi 54 champs de dunes, comprenant 495 dunes individuelles d’une hauteur comprise entre 2 et 120 mètres et ils ont étudié les images prises par la caméra HiRISE de la sonde Mars Reconnaissance Orbiter pendant 2 à 5 ans, pour établir une cartographie du volume de sable et du taux de migration des dunes.
Image du cratère Victoria dans la région Meridiani Planum de Mars obtenue par la caméra HiRISE (High Resolution Imaging Science Experiment) de la sonde MRO de la NASA. (NASA/ JPL-Caltech/ Université d’Arizona)
Toujours selon Chojnacki :
Nous voulions savoir : le mouvement du sable est-il uniforme à travers la planète, ou est-il plus important dans certaines régions que dans d’autres ? Nous avons mesuré la vitesse et le volume auxquels les dunes se déplacent sur Mars.
Ils ont découvert que la vitesse de migration des dunes en forme de croissant n’était en moyenne que d’un demi-mètre par an, environ 50 fois plus lente que les plus rapides dunes de sable de la Terre.
La migration d’une dune septentrionale en une année martienne (sol). (NASA/ JPL/ Université d’Arizona)
Les chercheurs ont étudié le sable à divers endroits, comprenant des cratères, des crevasses, des canyons, des plaines et des bassins polaires, et ils ont constaté que, de toutes les régions sablonneuses, le mouvement était plus marqué dans trois endroits.
Il s’agit du Syrtis Major Planum, une grande tache sombre entre les basses terres du nord et les hautes terres du sud, à l’ouest du bassin d’impact de l’Isidis Planitia, de l’Hellespontus Montes, une chaîne de montagnes qui s’étend sur 711 kilomètres entre la Noachis Terra et le bassin d’impact Hellas Planitia, et les ergs circumpolaires de l’Olympia et de l’Abalos Undae, une mer de sable qui entoure le pôle nord.
Les dunes d’Abalos Undae (couleurs modifiées). (NASA/ HiRISE/ Mars Reconnaissance Orbiter)
Ces trois endroits sont tous très différents les uns des autres, à l’exception de deux choses essentielles : ils présentent des transitions marquées dans leur topographie et leur température de surface.
Selon M. Chojnacki :
Ce ne sont pas des facteurs que l’on trouve dans la géologie terrestre. Sur Terre, les facteurs à l’œuvre sont différents de ceux de Mars. Par exemple, l’eau souterraine près de la surface ou les plantes qui poussent dans la zone retardent le mouvement du sable des dunes.
L’étude publiée dans Geology : Boundary condition controls on the high-sand-flux regions of Mars et présentée sur le site de l’université d’Arizona : On Mars, Sands Shift to a Different Drum.