Essai concluant : des champignons génétiquement améliorés peuvent tuer 99% des moustiques porteurs du paludisme
Dans les années 1980, l’humble village de Soumousso, au Burkina Faso, en Afrique de l’Ouest, a aidé à combattre le paludisme par une méthode ingénieuse : des moustiquaires imprégnées d’insecticide. Malheureusement, les moustiques ont développé une résistance aux insecticides largement utilisés et les moustiquaires sont devenues bien moins efficaces. Aujourd’hui, les chercheurs ont testé une nouvelle contre-mesure contre les moustiques, un champignon génétiquement modifié qui peut tuer ces insectes porteurs du paludisme.
Lors d’essais effectués dans une structure de 600 m2 à Soumousso, appelée MosquitoSphere, construite comme une serre, mais avec des moustiquaires, le champignon a éliminé 99 % des moustiques en un mois, selon les scientifiques.
Bien que les progrès dans la lutte contre le paludisme aient été phénoménaux, la maladie infectieuse transmise par les moustiques est actuellement en recrudescence dans les pays les plus touchés d’Afrique. Dans le monde, environ 220 millions de personnes sont infectées chaque année par un dangereux parasite qui se transmet à l’homme par les piqûres de moustiques infectés. Naturellement, les scientifiques qui cherchent à éradiquer le paludisme constatent que l’arrêt de son vecteur, les moustiques, est la ligne de conduite la plus efficace.
L’étude a donc été menée à l’intérieur d’une « mosquitosphère », un village factice de 600 mètres carrés au Burkina Faso, avec plantes, sources d’eau et maisons. L’ensemble du faux village a été recouvert d’une double couche de moustiquaires afin d’empêcher toute créature de s’échapper de l’habitat.
Quelques une des chambres à multiples moustiquaires contenant des huttes expérimentales, des plantes, de petits bassins de reproduction pour moustiques et une source de nourriture pour les moustiques. (Université du Maryland)
Des chercheurs de l’université du Maryland aux États-Unis et de l’Institut de recherche de l’IRSS au Burkina Faso ont relâché 1 500 moustiques à l’intérieur du village, dont le nombre a rapidement augmenté grâce aux conditions parfaites de reproduction et à l’absence de prédateurs. Mais l’équipe de recherche a ensuite introduit le champignon (Metarhizium) amélioré, génétiquement modifié pour produire une toxine que l’on trouve dans le venin d’une d’araignées mygalomorphes, Atracidae, originaire d’Australie. Sans cette modification, le champignon s’attaque aussi aux moustiques, mais diminue que très faiblement leur population.
Les spores fongiques ont été mélangées avec de l’huile de sésame et déposées sur des draps de coton noir. Lorsque les insectes ont atterri dessus, ils ont immédiatement été exposés au champignon mortel. En 45 jours, il ne restait plus que 13 moustiques, ont rapporté les chercheurs. Aucun autre insecte, comme les abeilles, n’a été infecté par le champignon. Seules certaines espèces de moustiques du genre Anophèles et seulement les femelles de ces espèces peuvent transmettre le paludisme. Cette maladie est causée par un parasite unicellulaire appelé Plasmodium, qui subit une série d’étapes d’infection avant d’arriver à la glande salivaire du moustique, à partir de laquelle il se propage finalement aux humains piqués. Selon les chercheurs :
Le déploiement du Metarhiziumag transgénique contre les moustiques pourrait (sous réserve d’une homologation appropriée) être rapide, avec des produits qui pourraient s’intégrer de manière synergique aux stratégies de lutte chimique existantes pour éviter la résistance aux insecticides.
Ces résultats suggèrent que son approche pourrait être efficace pour contrôler la propagation du paludisme. Cependant, la dissémination de créatures modifiées génétiquement dans la nature pourrait avoir des conséquences inattendues, c’est pourquoi la méthode doit être sérieusement examinée afin d’assurer une “biosécurité”. Les auteurs soulignent également que cette technologie n’a pas pour but d’éliminer les moustiques, mais plutôt de les contrôler et de contrôler la propagation des maladies.
Auparavant, les chercheurs ont mis au point d’autres astuces visant à freiner la propagation du paludisme, notamment des méthodes d’édition génétique CRISPR qui rendent les moustiques moins susceptibles de contracter des parasites responsables du paludisme et même des médicaments qui pourraient rendre le sang humain toxique pour les moustiques.
L’étude publiée dans Science : Transgenic Metarhizium rapidly kills mosquitoes in a malaria-endemic region of Burkina Faso et présentée sur le site de l’université du Maryland : Transgenic Fungus Rapidly Killed Malaria Mosquitoes in West African Study.