Des scientifiques découvrent comment éviter à la couleur jaune du Cri de continuer à blanchir
Le Cri d’Edvard Munch a rarement été exposé et il a plutôt été stocké pour préserver la célèbre peinture. Au fil des années, elle s’est lentement dégradée, les pigments jaunes de la peinture devenant blancs et certaines parties du tableau s’écaillant. Grâce à de nouvelles recherches, la toile peut être restaurée et conservée.
Une équipe internationale dirigée par le Conseil national de la recherche italien (CNR) a utilisé des méthodes spectroscopiques non invasives et les rayons X du synchrotron européen pour étudier en détail la nature des différents pigments utilisés par Munch, et comment ceux-ci se sont dégradés au fil du temps.
Des collaborateurs d’Italie, d’Allemagne, de Belgique, des États-Unis et de France ont d’abord amené la plateforme mobile européenne MOLAB au musée Munch d’Oslo, en Norvège, puis à Grenoble, en France, et le synchrotron européen, la source de rayons X la plus brillante du monde.
Selon Letizia Monico, du CNR, l’une des auteures d’une nouvelle étude :
Les micro-analyses du synchrotron nous ont permis d’identifier la principale raison du déclin du tableau, qui est l’humidité. Nous avons également constaté que l’impact de la lumière dans la peinture est mineur.
Il existe, en fait, plusieurs versions du Cri : deux peintures, deux pastels, plusieurs lithographies et quelques dessins et esquisses. Les plus connues sont les peintures, créées en 1893 et vers 1910, cette dernière étant conservée par le musée de Munch.
Chacune est unique, et cela fait partie du problème, selon les chercheurs. Munch a cherché à trouver les couleurs exactes pour représenter son expérience personnelle, en mélangeant divers liants (détrempe, huile et pastel) avec des pigments synthétiques pour obtenir des « couleurs criardes ».
Malheureusement, l’utilisation intensive de ces nouveaux matériaux colorés pose un problème pour la préservation à long terme du tableau de 1910, qui montre clairement des signes de dégradation dans les différentes zones où des pigments à base de sulfure de cadmium ont été utilisés.
Bien entendu, le tableau n’a pas toujours été très bien entretenu. Il a été volé en 2004 et il a disparu pendant deux ans.
Depuis sa récupération, il a rarement été montré au public. Il est plutôt conservé dans une zone de stockage protégée au musée de Munch, dans des conditions contrôlées d’éclairage, de température (environ 18 °C) et d’humidité relative (environ 50 %).
L’étude montre que le sulfure de cadmium original se transforme en sulfate de cadmium en présence de composés chlorés dans des conditions de forte humidité. Cela se produit même s’il n’y a pas de lumière.
Selon Irina Sandu, scientifique de la conservation du musée :
La bonne formule pour préserver et exposer en permanence la version principale de Cri devrait inclure l’atténuation de la dégradation du pigment jaune de cadmium en minimisant l’exposition de la peinture à des niveaux d’humidité excessivement élevés, en essayant d’atteindre 45 % d’humidité relative ou moins, tout en maintenant l’éclairage aux valeurs standard prévues pour les matériaux de peinture résistants à la lumière.
Les résultats de cette étude apportent de nouvelles connaissances, qui peuvent conduire à des ajustements pratiques de la stratégie de conservation du musée.
Munch n’était pas le seul à utiliser des jaunes à base de sulfure de cadmium. Ils sont présents dans les travaux de contemporains aussi célèbres qu’Henri Matisse, Vincent Van Gogh et James Ensor.
Selon Costanza Miliani du MOLAB :
L’intégration d’enquêtes in-situ non invasives à l’échelle macro avec des micro-analyses synchrotron a prouvé sa valeur en nous aidant à comprendre des processus d’altération complexes.
Il peut être exploité avec profit pour interroger des chefs-d’œuvre qui pourraient souffrir de la même faiblesse.
L’étude publiée dans Science Advances : Probing the chemistry of CdS paints in The Scream by in situ noninvasive spectroscopies and synchrotron radiation x-ray techniques et présentée sur le site du Conseil national de la recherche italien : ‘L’Urlo’ di Munch: trovata la soluzione per evitarne lo scolorimento et sur le site du Synchrotron Européen : The quest to preserve “The Scream”.