Il s’avère que le plus grand omnivore de la Terre est le requin-baleine
Des scientifiques australiens ont découvert que l’énorme requin-baleine (Rhincodon typus) mange des plantes, ce qui en fait officiellement le plus grand omnivore de la planète.
Les requins-baleines peuvent mesurer jusqu’à 18 mètres de long et peser jusqu’à 43 tonnes. Ce sont des filtreurs connus pour leur consommation de krill, un petit crustacé ressemblant à une crevette, mais nous savons maintenant qu’ils mangent aussi beaucoup de végétaux.
Selon une nouvelle étude (lien plus bas), des échantillons de tissus prélevés sur des requins-baleines au récif de Ningaloo, au large des côtes de l’Australie occidentale, indiquent également que, même s’ils mangent du krill, ils n’en métabolisent peut-être pas beaucoup.
Selon le premier auteur, le Dr Mark Meekan, un biologiste spécialiste des poissons de l’Institut australien des sciences marines (AIMS) :
Cela nous amène à repenser tout ce que nous pensions savoir sur ce que mangent les requins-baleines. Et, en fait, ce qu’ils font en plein océan.
Sur terre, tous les plus gros animaux ont toujours été des herbivores. Dans la mer, nous avons toujours pensé que les animaux devenus très gros, comme les baleines et les requins-baleines, se nourrissaient un échelon plus haut dans la chaîne alimentaire d’animaux ressemblant à des crevettes et de petits poissons.
Il s’avère que le système d’évolution sur terre et dans l’eau n’est peut-être pas si différent après tout.
Dans les systèmes marins, les plus grands animaux sont des filtreurs qui mangent du necton (organismes aquatiques nageant activement) qui forment des patchs denses permettant de récolter de grandes quantités de nourriture en une seule fois.
Mais dans les régions côtières, ces zones accumulent également des débris flottants comme les macroalgues (algues marines visibles à l’œil nu).
Les scientifiques ont voulu savoir comment les requins-baleines réagissent à l’ingestion de ces matières. Pour déterminer exactement ce qu’ils mangeaient, ils ont donc prélevé des échantillons de sources de nourriture possibles sur le récif.
Du minuscule phytoplancton aux algues, ils ont comparé les acides aminés et les acides gras des sources alimentaires potentielles à ceux trouvés dans les tissus des requins-baleines.
L’équipe a constaté que les tissus des requins-baleines étaient riches en acides gras polyinsaturés N-6 (AGPI), notamment en acide arachidonique, des composés que l’on trouve en proportions relativement élevées dans le sargassum, un type d’algue brune qui se détache du récif et flotte à la surface de l’eau à Ningaloo.
Selon Meekan :
Nous pensons qu’au cours de l’évolution, les requins-baleines ont acquis la capacité de digérer une partie de ce Sargassum qui entre dans leurs intestins. Ainsi, la vision que nous avons des requins-baleines venant à Ningaloo pour se régaler de ces petits krills n’est que la moitié de l’histoire.
En fait, ils mangent aussi une bonne quantité d’algues.
Pour aller plus loin, ils ont ensuite analysé les échantillons de tissus en utilisant l’analyse des isotopes stables spécifiques des composés (CSIA pour compound-specific stable isotope analysis), une méthode utilisée pour mesurer les ratios d’isotopes stables naturels incorporés dans les tissus à partir de l’alimentation.
Le Dr Andy Revill, coauteur de l’étude et biogéochimiste organique au CSIRO Oceans and Atmosphere (Australie), qui a analysé les échantillons à l’aide de la CSIA, explique que les requins-baleines nagent dans l’eau la bouche ouverte, précisant que :
Il va ingérer un grand nombre de choses différentes. Mais on ne sait pas quelle proportion a été utilisée par l’animal et quelle proportion est sortie directement par l’autre extrémité.
Les isotopes stables, parce qu’ils sont incorporés dans le corps, reflètent beaucoup mieux ce que les animaux utilisent pour se développer.
Et ce qu’ils ont trouvé fut assez surprenant.
Selon la coauteure, Patti Virtue, océanographe biologique de l’Institut d’études marines et antarctiques de l’Université de Tasmanie :
C’est très étrange, parce que dans leurs tissus, ils n’ont pas la signature d’un acide gras ou d’un isotope stable d’un animal se nourrissant de krill.
Bien que les échantillons de déjections de baleines collectées aient révélé que les requins-baleines mangeaient effectivement du krill, leurs tissus indiquaient qu’ils n’en métabolisaient pas beaucoup.
L’étude publiée dans la revue Ecology : The world’s largest omnivore is a fish et présentée sur le site de l’Australian Institute of Marine Science : World’s largest omnivore is a fish.